Pourquoi Lisbonne devient une destination à éviter ?

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Connue pour sa lumière dorée, ses ruelles pavées et ses miradouros qui embrassent le Tage, Lisbonne est devenue, en deux décennies, l’une des capitales européennes les plus prisées. Mais derrière cette image de carte postale, la ville s’essouffle. En 2025, le célèbre guide de voyage Fodor’s l’a inscrite dans sa « No List », aux côtés de Bali, Venise ou encore le Mont Everest : une liste de destinations où le tourisme menace l’équilibre local.

Ce n’est pas une incitation au boycott, précisent les auteurs, mais un appel à la prise de conscience. Car le tourisme de masse n’est plus soutenable dans ces lieux emblématiques, aussi beaux soient-ils. Lisbonne, comme d’autres, est en train de basculer sous le poids de son succès.

Une capitale vidée de ses habitants

Depuis dix ans, les chiffres parlent d’eux-mêmes. Près de 30 % des Lisboètes ont quitté le centre-ville depuis 2013, chassés par la flambée des loyers, la gentrification et la prolifération des locations touristiques de courte durée. On estime aujourd’hui que plus de 60 % des logements du centre historique sont dédiés aux touristes. Certains quartiers comme Alfama, Mouraria ou le Bairro Alto se sont transformés en décors sans vie la journée, et en zones de fête nocturne déconnectées du quotidien lisboète.

Près de 30 % des Lisboètes ont quitté le centre-ville depuis 2013

Ce phénomène, accentué par des politiques incitatives post-crise de 2008, a aussi provoqué une hausse généralisée du coût de la vie. Lisbonne figure désormais parmi les villes les moins abordables d’Europe pour ses résidents, une réalité bien éloignée du rêve des brochures touristiques.

Le quotidien perturbé par l’afflux massif de visiteurs

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En 2024, le nombre de visiteurs étrangers en Europe a dépassé les niveaux d’avant-pandémie. Lisbonne, en tant que destination majeure, n’a pas échappé à cette déferlante. Pour ses habitants, cela signifie rues bondées, transports saturés, files interminables devant les monuments et une perte de la tranquillité quotidienne. Certains en viennent à éviter leur propre centre-ville.

Comme à Barcelone ou à Venise, des tensions émergent entre visiteurs et résidents. Si les manifestations sont encore rares à Lisbonne, les plaintes se multiplient. De plus en plus d’habitants dénoncent le bruit, la disparition des commerces de proximité et la transformation de leur ville en produit de consommation éphémère.

Une prise de conscience nécessaire

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Le classement de Lisbonne par Fodor’s 1 n’est pas un désaveu mais un signal. Il rappelle que même les destinations les plus séduisantes doivent aujourd’hui repenser leur modèle touristique. Comment accueillir sans détruire ? Comment préserver sans exclure ? Lisbonne n’est pas seule face à ces questions. Mais sa singularité, son charme et son identité fragile rendent l’enjeu encore plus pressant.

Comment accueillir sans détruire ? Comment préserver sans exclure ?

Le tourisme durable n’est plus un luxe mais une nécessité. Des pistes existent : plafonnement des locations courtes, développement d’offres culturelles hors des sentiers battus, encouragement du tourisme hors saison, promotion des régions voisines comme l’Alentejo ou la côte ouest, ou même la réalité augmentée, comme le pensent certains ! Mais sans volonté politique forte, Lisbonne risque de perdre ce qui faisait sa magie : sa vie locale.

Sans volonté politique forte, Lisbonne risque de perdre ce qui faisait sa magie : sa vie locale.

Lisbonne peut-elle éviter le destin de Venise ?

Le parallèle revient sans cesse, comme une prophétie redoutée. À l’image de Venise, où les résidents fuient un centre devenu inaccessible, Lisbonne glisse doucement vers un modèle de ville-musée, calibrée pour les regards extérieurs, au détriment de la vie locale. À Venise, les gondoles naviguent devant des immeubles vides. À Lisbonne, les tramways iconiques serpentent entre des façades rénovées … mais désertées.

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Pour l’instant, Lisbonne garde encore une partie de son authenticité. Le petit café en bas de la rue où l’on entend parler portugais, la vieille dame qui ouvre ses volets à Alfama, les jeunes qui jouent de la guitare sur les escaliers du Miradouro da Graça … Mais pour combien de temps ? Car derrière les façades colorées, le cœur de la ville bat plus faiblement. Le nombre de résidents permanents chute, les commerces de proximité disparaissent, et les nouveaux arrivants n’ont souvent pas les moyens d’y rester longtemps.

Le classement de Fodor’s peut être vu comme une gifle, mais aussi comme une opportunité. Une alerte salutaire pour entamer une réflexion collective. Quel tourisme pour demain ? Peut-on imaginer un modèle où le visiteur devient un hôte attentif, et non un consommateur pressé ? Où l’on prend le temps de comprendre une culture, d’écouter les habitants, de sortir des circuits saturés ?

Car ceux qui aiment Lisbonne – les touristes sincères, les nomades numériques installés, les passionnés de culture, les Portugais eux-mêmes – doivent désormais choisir leur façon de l’aimer. Lisbonne ne doit pas être sacrifiée sur l’autel de la rentabilité touristique. Elle peut encore être une capitale vivante, ouverte et préservée. Mais cela demandera du courage politique, des choix audacieux, et une réelle volonté de penser l’avenir autrement.


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