Un aéroport incertain : les inquiétudes pour le tourisme portugais

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À l’heure où le tourisme portugais renoue avec des niveaux de fréquentation élevés, la perspective d’une attente prolongée pour la construction du nouvel aéroport de Lisbonne suscite une vive inquiétude dans le secteur. L’infrastructure actuelle, surchargée, limite depuis plusieurs années le développement du trafic aérien dans la région de la capitale. Or, les échéances évoquées pour le nouvel aéroport — qui pourrait ne pas voir le jour avant 2037 — apparaissent déconnectées des urgences économiques et logistiques exprimées par les professionnels du tourisme. Ces incertitudes pèsent sur la planification des investissements, tout comme sur la capacité du pays à soutenir une croissance durable de son attractivité internationale.

Un calendrier jugé incompatible avec les besoins du secteur

Pour les professionnels du tourisme, attendre jusqu’à deux décennies pour une nouvelle plateforme aéroportuaire revient à hypothéquer l’avenir. Selon Francisco Calheiros, président de la Confederação do Turismo de Portugal (CTP) 1, le secteur n’a ni le temps ni la résilience pour endurer une telle inertie. Le dirigeant, interrogé par l’agence Lusa, alerte sur le caractère irréaliste de l’échéance envisagée, qui pourrait freiner durablement l’arrivée de visiteurs dans la région métropolitaine de Lisbonne.

L’aéroport Humberto Delgado, principal point d’entrée international du pays, fonctionne déjà à la limite de ses capacités.

La situation actuelle est d’autant plus préoccupante que l’aéroport Humberto Delgado, principal point d’entrée international du pays, fonctionne déjà à la limite de ses capacités. Le manque d’espace, la saturation des pistes et les contraintes logistiques affectent la qualité du service, tant pour les compagnies aériennes que pour les voyageurs. Or, le tourisme portugais est devenu l’un des moteurs de l’économie nationale. Il ne peut donc se permettre une stagnation prolongée sans conséquences sur l’emploi, les recettes fiscales et l’image du pays.

Incertitude du lieu et lenteur bureaucratique

La localisation de la future infrastructure, bien qu’annoncée, n’apporte guère de réconfort. Le choix du champ de tir d’Alcochete comme site retenu par le gouvernement semble à présent compromis, du fait des incertitudes politiques croissantes. L’alternance gouvernementale pourrait remettre en question ce projet, ou du moins freiner son avancement. Dans un contexte de transition politique, rien ne garantit la pérennité des décisions déjà prises.

La lenteur bureaucratique et l’arrêt des négociations avec ANAAeroportos de Portugal, concessionnaire du groupe Vinci, ne font qu’accentuer la frustration des acteurs économiques. L’organisation de la filière touristique demande une vision à long terme, mais aussi une action à court terme. L’absence de dialogue et de planification cohérente fait craindre un immobilisme nuisible à l’ensemble de l’écosystème touristique.

Une instabilité politique qui nourrit les incertitudes

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La composition du prochain gouvernement portugais constitue un facteur déterminant dans le devenir du projet aéroportuaire. Le changement de majorité, voire d’orientation politique, pourrait redéfinir les priorités en matière d’infrastructures. C’est précisément cette incertitude qui alarme les organisations professionnelles du secteur. Selon Francisco Calheiros, un gouvernement PS adopterait une ligne différente d’un gouvernement PSD, sans que l’on puisse affirmer aujourd’hui quel plan serait effectivement poursuivi.

Une décision technique dépendante du politique

Si Pedro Nuno Santos, actuel secrétaire général du Parti Socialiste, a assuré qu’il maintiendrait le choix d’Alcochete en cas de victoire électorale, cette promesse ne suffit pas à apaiser les craintes. Son expérience passée en tant que ministre de l’Infrastructure ne garantit pas que les rapports de force politiques et administratifs ne viendront pas, une fois de plus, bloquer les avancées.

Selon les prévisions actuelles, le nouvel aéroport ne pourrait être opérationnel qu’en 2037, au mieux.

Le projet repose également sur la coopération avec ANA 2, partenaire privé incontournable dans le déploiement du futur terminal. Or, selon les prévisions actuelles, le nouvel aéroport ne pourrait être opérationnel qu’en 2037, au mieux. Même si certaines optimisations réduisent ce délai d’un an, l’horizon demeure trop lointain au regard des urgences sectorielles. En l’absence d’un cap politique ferme et d’un calendrier consolidé, l’avenir reste suspendu à une chaîne de décisions incertaines.

Une attente incompatible avec les ambitions touristiques du Portugal

Depuis une décennie, le Portugal s’est imposé comme l’une des destinations européennes les plus dynamiques. Lisbonne attire chaque année des millions de visiteurs, et les perspectives de croissance restent fortes. Toutefois, cette dynamique dépend largement de la fluidité des accès internationaux, principalement aériens. Un retard structurel dans les infrastructures menace donc non seulement le volume des arrivées, mais aussi la réputation du pays comme destination moderne et bien connectée.

De nombreux professionnels redoutent que les tour-opérateurs, compagnies aériennes et investisseurs se tournent vers d’autres destinations mieux desservies. La perte de compétitivité liée à la saturation actuelle des vols et à la complexité logistique pourrait avoir des conséquences durables. Certains projets hôteliers ou de restauration sont déjà repoussés ou suspendus en raison du flou entourant le futur de l’aéroport.

La situation touche également d’autres maillons de la chaîne touristique, comme les agences de voyages, les organisateurs d’événements ou les loueurs de voitures, qui planifient leurs activités en fonction de la capacité d’accueil du pays. Tous réclament une clarification rapide des choix politiques et des délais techniques. Faute de quoi, c’est l’ensemble de la filière qui risque une perte de vitesse au moment même où elle pourrait capitaliser sur une demande croissante.

Le rôle décisif d’un calendrier crédible et négocié

Dans les échanges entre les autorités publiques et les acteurs privés, le facteur temps devient central. ANA – Aeroportos de Portugal évoque 2037 comme date butoir, mais reconnaît qu’une concertation efficace pourrait permettre une ouverture dès 2036. Le problème, cependant, n’est pas seulement technique : il est aussi administratif, politique et financier. C’est la capacité à aligner les volontés, les investissements et les compétences qui fera la différence.

  • Un manque de visibilité stratégique entrave les engagements à long terme du secteur privé.
  • L’arrêt des négociations actuelles avec ANA crée un blocage préoccupant.
  • Les changements politiques pourraient remettre en cause les décisions prises.
  • Une absence de plan d’urgence pour renforcer l’aéroport actuel fragilise la période de transition.
  • Le retard du projet affecte déjà les prévisions d’affluence pour les années à venir.

Face à ces constats, les professionnels du tourisme réclament une feuille de route claire et partagée. Il ne s’agit plus seulement de choisir un site ou de lancer des appels d’offres, mais de restaurer la confiance des investisseurs et des partenaires étrangers. Une décision ferme, assortie d’un planning crédible, serait un premier pas vers une gestion plus proactive de la transition aéroportuaire portugaise.

Une opportunité manquée ou un virage à saisir ?

Des risques bien réels à court et moyen terme

Le Portugal pourrait perdre en attractivité s’il tarde à offrir des infrastructures de niveau international. Cette faiblesse est d’autant plus dommageable qu’elle intervient dans un contexte où la concurrence entre grandes destinations européennes est forte. L’Espagne, l’Italie ou la Croatie investissent massivement dans leurs aéroports. À l’inverse, le Portugal semble s’enliser dans des débats politiques sans issue concrète à court terme.

Les pertes économiques liées à la situation sont difficiles à quantifier, mais bien réelles. Elles se manifestent par une limitation de la croissance, un effet dissuasif sur les investissements et une perte de compétitivité. À cela s’ajoute le risque de dégradation de l’image du pays en matière d’accueil touristique.

Pour les professionnels du tourisme, l’essentiel ne réside plus seulement dans le choix du site mais dans la capacité du gouvernement à enclencher un processus décisif, sans nouvelle interruption.

Vers un engagement collectif en faveur de la mobilité aérienne

Plus que jamais, les attentes convergent vers un compromis national qui dépasserait les clivages partisans. L’enjeu dépasse la seule capitale : c’est l’image du Portugal dans le monde et sa compétitivité à long terme qui sont en jeu. L’industrie touristique, fragilisée par des années de crise sanitaire, a besoin de repères stables pour continuer à prospérer. Sans infrastructure adaptée, aucun plan de croissance ne peut être durable.

La solution ne passera sans doute pas par une décision isolée, mais par une alliance entre pouvoirs publics, partenaires privés, collectivités locales et société civile. C’est à ce prix que pourra émerger un projet structurant, au service de la transition économique et écologique du pays.

Le nouvel aéroport de Lisbonne peut encore devenir un moteur de transformation — à condition que le temps politique s’aligne enfin sur les besoins du terrain.

  1. Confederação do Turismo de Portugal : https://ctp.org.pt/ ↩︎
  2. ANA : https://www.ana.pt/ ↩︎

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