La tuberculose au Portugal, un enjeux de santé

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La tuberculose, maladie infectieuse ancienne mais persistante, continue de représenter un défi sanitaire au Portugal. En 2023, le pays a enregistré plus de 1 500 cas, un chiffre qui, malgré sa stabilité apparente, soulève des préoccupations quant à la réactivité du système de santé et la vulnérabilité de certaines populations. Le rapport de la Direction Générale de la Santé (DGS), publié à l’occasion de la Journée mondiale de la tuberculose, met en lumière des disparités régionales et sociales, une progression inquiétante dans certains groupes, ainsi qu’un délai croissant entre l’apparition des symptômes et le diagnostic. La situation appelle une réévaluation des stratégies actuelles et une attention renforcée envers les populations à risque. Voici un état des lieux complet pour mieux comprendre les défis à venir.

Une stabilité trompeuse : les chiffres clés de 2023

En 2023, le Portugal a enregistré 1 584 cas de tuberculose, soit un taux de notification de 14,9 cas pour 100 000 habitants, identique à celui de 2022. Ce chiffre regroupe 1 461 nouveaux cas et 123 cas de retraitement, ce qui montre que la maladie n’est pas en recul, malgré les efforts de surveillance et de traitement. La stabilité du taux interpelle : elle indique une persistance du phénomène, plutôt qu’une amélioration.

La forme pulmonaire reste la plus courante, représentant 70,8 % des cas. C’est également la plus préoccupante du point de vue de la contagion, car plus de la moitié de ces cas (51,4 %) étaient contagieux. Cela souligne l’urgence d’un diagnostic rapide et d’un traitement immédiat pour limiter la propagation de la maladie dans la communauté.

En termes de mortalité, 76 décès ont été recensés, soit un taux de létalité de 4,8 %. Ces décès concernent principalement des personnes âgées de plus de 75 ans et sont souvent associés à d’autres pathologies chroniques. La tuberculose frappe donc plus durement les plus fragiles.

La répartition par sexe montre également un déséquilibre : 68,3 % des cas sont des hommes. De plus, les enfants et adolescents de moins de 15 ans ont représenté 2,8 % des cas, un chiffre modeste mais significatif, qui rappelle que la tuberculose n’épargne aucune tranche d’âge.

Des disparités régionales et sociales marquées

Les régions les plus touchées restent Lisbonne et Vale do Tejo avec 18,2 cas pour 100 000 habitants, et la région Nord avec 16 cas pour 100 000 habitants. Ces zones concentrent historiquement les foyers de tuberculose en raison de leur densité de population et de la présence accrue de populations à risque.

Une vulnérabilité accrue des populations migrantes

Le rapport souligne une situation préoccupante parmi les populations migrantes, qui présentent un taux de notification 3,6 fois supérieur à la moyenne nationale, atteignant 54,3 cas pour 100 000 migrants. Cette population représentait 35,8 % des cas en 2023, contre 30 % l’année précédente. La progression est significative et traduit une exposition accrue à la maladie, souvent liée à des conditions de vie précaires, à un accès limité aux soins, ou à des facteurs sociaux aggravants.

Ce constat appelle une action ciblée, non seulement en matière de dépistage, mais aussi d’accompagnement social et de sensibilisation. L’inclusion des partenaires locaux est essentielle pour améliorer l’accès aux soins, valoriser les symptômes et permettre une prise en charge précoce.

Les retards de diagnostic : un facteur aggravant

En 2023, le délai médian de diagnostic pour les formes pulmonaires était de 78 jours, un chiffre en forte hausse par rapport à 2022 (53 jours), et proche du niveau national (81 jours). Ces délais allongés augmentent le risque de transmission dans la communauté et peuvent compromettre les chances de guérison. Ce phénomène n’est pas uniquement dû à la lenteur du système, mais aussi au retard du patient lui-même (43 jours en moyenne), souvent causé par une méconnaissance des symptômes ou une difficulté d’accès aux structures de soins.

Le délai imputable aux services de santé reste en moyenne de 13 jours. Ce chiffre, relativement stable, montre que les efforts peuvent encore être améliorés, notamment en formant les professionnels à considérer la tuberculose dès les premiers signes respiratoires. Une sensibilisation accrue pourrait accélérer les démarches diagnostiques et éviter une aggravation inutile.

Vers de nouvelles stratégies ciblées

Le maintien du taux de notification au même niveau qu’en 2022 montre que les efforts actuels atteignent leurs limites. Selon la directrice du Programme National de Lutte contre la Tuberculose, Isabel Carvalho, il est essentiel de revoir les stratégies actuelles en ciblant davantage les groupes à risque. Cela implique d’identifier précocement les personnes infectées dans les communautés vulnérables et de leur proposer un traitement préventif.

Il ne suffit plus de réagir aux cas déclarés : il faut anticiper. Cela passe par un dépistage actif, une meilleure coordination avec les services sociaux, et un travail sur les déterminants sociaux de santé, comme les addictions, le VIH, le diabète mal contrôlé ou encore les cancers. Ces comorbidités augmentent le risque de développer une forme active de la maladie.

L’enjeu n’est pas uniquement médical, mais aussi sociétal. Une politique de santé publique efficace doit s’appuyer sur une approche intégrée, où les acteurs de terrain, les associations, les autorités sanitaires et les collectivités locales agissent ensemble.

Enfin, la vigilance des professionnels de santé doit être renforcée. Il est indispensable qu’ils incluent plus systématiquement la tuberculose dans leurs hypothèses diagnostiques, surtout en présence de symptômes respiratoires persistants.

Une maladie toujours d’actualité

Alors que certains la considèrent comme appartenant au passé, la tuberculose continue de circuler activement dans certaines régions et au sein de certains groupes sociaux au Portugal. Le rapport 2023 de la DGS rappelle avec insistance que la lutte contre cette maladie nécessite une mobilisation constante, une adaptation des politiques publiques, et une prise en charge rapide et ciblée des cas suspects.

Agir ensemble auprès des plus fragiles

Pour enrayer la stagnation du taux de cas, il devient impératif d’impliquer tous les partenaires locaux et d’adopter une approche inclusive. Sensibiliser les populations vulnérables, faciliter leur accès aux soins, lever les barrières culturelles et économiques : autant de leviers qui peuvent faire la différence. La tuberculose reste évitable et curable, à condition d’être identifiée à temps et traitée efficacement.

La santé publique portugaise dispose d’outils solides, mais leur déploiement doit s’adapter aux réalités de terrain. C’est par un travail coordonné, entre médecine, prévention et action sociale, que le Portugal pourra espérer voir enfin baisser durablement le nombre de cas de tuberculose.


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