Le Portugal traverse une crise majeure dans le secteur de l’immobilier, marquée par une hausse significative des coûts du logement. Selon l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), le pays figure parmi les économies avancées les plus touchées par cette problématique en 2024. Mais quelles sont les causes de cette situation et quels en sont les impacts sur la population et l’économie ? Décryptage.
Les causes d’une augmentation constante des prix
La hausse des coûts du logement au Portugal est principalement liée à un déséquilibre entre l’offre et la demande. Au cours des dernières années, le pays a enregistré une croissance démographique soutenue, notamment en raison de l’immigration. Cependant, la construction de nouveaux logements n’a pas suivi cette tendance, aggravant la pénurie d’habitations disponibles.
À cela s’ajoute un nouvel élément qui exacerbe la situation : la baisse récente des taux d’intérêt sur les prêts hypothécaires. Bien que les taux restent élevés par rapport aux standards historiques, les premières baisses effectuées par la Banque centrale européenne (BCE) en juin dernier ont stimulé la demande de logements, amplifiant ainsi la pression sur un marché déjà tendu.
Dans un contexte où les politiques monétaires se sont montrées restrictives dans plusieurs pays, la relance progressive de la mobilité des travailleurs après la pandémie a également contribué à maintenir une forte demande, rendant les logements encore moins accessibles.
Une hausse marquée par des comparaisons internationales
Au niveau mondial, le Portugal a enregistré en octobre 2024 la cinquième plus forte augmentation des prix immobiliers, avec une hausse annuelle de 6,5 %. Cette progression place le pays derrière des économies telles que le Royaume-Uni (7,1 %), le Canada (7,1 %), l’Australie (6,7 %) et la Lettonie (6,6 %). Ces chiffres témoignent d’une tendance globale où plusieurs économies avancées sont confrontées à une flambée des coûts de logement.
Les données révélatrices de l’OCDE
Dans son dernier rapport, l’OCDE 1 souligne que la demande de logements reste très forte dans les pays avancés. En particulier, au Portugal, l’insuffisance de l’offre combinée à l’augmentation de la demande a eu un impact direct non seulement sur le prix des logements, mais également sur les loyers, qui connaissent une hausse constante.
Le rapport précise également que la hausse des coûts ne se limite pas aux seuls logements résidentiels. Les investissements dans l’immobilier commercial et touristique, très présents au Portugal, contribuent aussi à la compétition sur le marché. De plus, les retards dans les processus de construction et les réglementations locales freinent le développement de nouvelles infrastructures.
Un marché sous tension malgré les ajustements monétaires
Malgré des politiques monétaires plus strictes, l’impact attendu sur les prix immobiliers ne s’est pas pleinement manifesté. La BCE, par exemple, a mis en place des hausses de taux d’intérêt ces dernières années, avant d’amorcer une baisse progressive en juin 2024, réduisant ainsi les coûts des prêts hypothécaires. Cependant, cet ajustement monétaire semble avoir renforcé la demande au lieu de la freiner, créant une dynamique paradoxale dans laquelle les prix continuent de grimper.
De nombreux experts estiment que seule une accélération significative des projets de construction pourrait permettre de rééquilibrer le marché. Cependant, cela nécessiterait des réformes structurelles, une simplification des processus administratifs et une plus grande collaboration entre les secteurs public et privé.
Les impacts sur la population et les solutions possibles
La hausse des coûts du logement a des conséquences directes sur le pouvoir d’achat des ménages portugais. Beaucoup peinent à accéder à la propriété ou à louer un logement à un prix raisonnable, ce qui entraîne une précarité accrue pour certaines catégories de population. Les jeunes, en particulier, se retrouvent souvent contraints de vivre plus longtemps chez leurs parents ou de partager des logements, un phénomène de plus en plus courant dans les grandes villes comme Lisbonne et Porto.
- Augmentation des loyers : les locataires subissent une pression financière croissante, surtout dans les zones urbaines.
- Migration urbaine : de nombreuses familles quittent les centres-villes pour s’installer en périphérie, augmentant les temps de trajet et les coûts associés.
- Diminution de l’accessibilité : les ménages à revenus moyens ou faibles ont de plus en plus de mal à accéder à des logements adéquats.
Face à ces défis, plusieurs pistes sont envisagées : incitations fiscales pour la construction de nouveaux logements, régulation des prix des loyers dans les zones tendues et soutien à la rénovation des bâtiments anciens pour augmenter l’offre locative. Toutefois, ces mesures nécessitent une volonté politique forte et une mise en œuvre rapide pour être efficaces.
Une crise qui appelle des réformes structurelles
La flambée des coûts du logement au Portugal est symptomatique d’un marché immobilier déséquilibré, où l’offre ne parvient pas à répondre à une demande toujours croissante. Si la situation actuelle reflète des dynamiques globales, le pays doit agir rapidement pour éviter une crise sociale majeure. L’accélération des projets de construction, combinée à une régulation efficace, pourrait permettre de stabiliser le marché à long terme. En attendant, les ménages portugais continueront de subir les conséquences d’un marché sous haute tension.
- https://www.oecd.org/fr/publications/perspectives-economiques-de-l-ocde-volume-2024-numero-2_0481cf21-fr/full-report/portugal_833c2453.html ↩︎