Portugal : la nouvelle loi sur l’immigration entre en vigueur

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Le président portugais, Marcelo Rebelo de Sousa, a promulgué, jeudi 16 octobre, la nouvelle Loi des étrangers, un texte controversé qui restreint plusieurs droits d’accès et d’installation pour les ressortissants non européens. Après plusieurs semaines de tension institutionnelle, cette promulgation met fin à un long bras de fer entre la présidence, le gouvernement et le Tribunal constitutionnel.

Un texte révisé après la censure du Tribunal constitutionnel

Le chef de l’État avait initialement refusé de promulguer la première version de la loi, estimant qu’elle comportait plusieurs irrégularités constitutionnelles. Saisi par le président lui-même, le Tribunal constitutionnel avait confirmé ces doutes, jugeant inconstitutionnels cinq points du texte. Le gouvernement a alors ajusté le projet, avant de le soumettre à nouveau au vote du Parlement le 30 septembre, où il a été adopté à plus de 70 % des voix.

Dans un communiqué publié sur le site de la Présidence, Marcelo Rebelo de Sousa justifie sa décision en estimant que « le texte désormais approuvé répond, au minimum, aux principales réserves constitutionnelles exprimées précédemment ». La loi entrera en vigueur dès sa publication au Diário da República, le journal officiel portugais.

Un soutien décisif de l’extrême droite

Le texte a été adopté grâce au soutien décisif du parti d’extrême droite Chega, dont les voix se sont révélées cruciales pour assurer la majorité. La coalition gouvernementale de centre droit, menée par le premier ministre Luís Montenegro et issue de l’Aliança Democrática (AD), a également bénéficié de l’appui ponctuel de la Iniciativa Liberal (IL) et du Juntos pelo Povo (JPP). Le Parti socialiste (PS), principal parti d’opposition, a voté contre, ses propositions d’amendement n’ayant pas été retenues.

Cette configuration parlementaire illustre une dynamique politique nouvelle : les relations de plus en plus pragmatiques entre la droite traditionnelle et Chega, sur fond de crispation migratoire. Pour le gouvernement, cette alliance ponctuelle constitue une victoire politique et symbolique, marquant l’un des premiers succès législatifs de la législature.

Un durcissement net de la politique migratoire

La loi promulguée modifie en profondeur le régime d’entrée, de séjour et d’éloignement des étrangers au Portugal. Elle vise à réduire les flux migratoires et à rendre plus strictes les conditions d’installation. Parmi les principales mesures adoptées figurent :

  • l’allongement du délai nécessaire avant de pouvoir demander un regroupement familial ;
  • la restriction du visa de recherche d’emploi aux seules professions dites « à hautes qualifications », dont la liste n’a pas encore été publiée ;
  • et un renforcement des contrôles administratifs pour les permis de résidence temporaires.

Ces mesures marquent un tournant par rapport à la politique menée ces dernières années, où le Portugal s’était distingué par une approche ouverte de l’immigration, notamment pour compenser le déclin démographique et la pénurie de main-d’œuvre dans plusieurs secteurs économiques.

Un changement d’époque pour la politique d’accueil portugaise

La restriction de l’immigration figurait parmi les promesses phares de la campagne de Luís Montenegro. Dès son premier Conseil des ministres, le nouveau gouvernement avait annoncé son intention de « mettre fin à la politique de portes ouvertes » adoptée par les précédents exécutifs. Cette orientation rompt avec le modèle plus libéral initié par le Parti socialiste, qui avait facilité la régularisation de nombreux travailleurs étrangers au cours de la dernière décennie.

Pour les partisans de la réforme, la mesure permettra de mieux « réguler » les entrées sur le territoire et de lutter contre les situations d’exploitation et de travail informel. Pour ses détracteurs, elle risque d’affaiblir la cohésion sociale et de compromettre la reprise de certains secteurs dépendants de la main-d’œuvre étrangère, comme la construction, l’agriculture ou le tourisme.

Une loi emblématique d’un virage politique européen

La décision de Lisbonne s’inscrit dans une tendance plus large observée en Europe : resserrement des conditions migratoires, durcissement des politiques d’accueil et montée des partis populistes. Si le Portugal avait jusqu’ici résisté à ce mouvement, le virage opéré par le gouvernement de Luís Montenegro montre que le pays n’échappe pas à la pression politique d’une opinion publique de plus en plus sensible à la question migratoire.

En promulguant la loi, Marcelo Rebelo de Sousa cherche visiblement à préserver l’équilibre institutionnel tout en évitant un nouveau conflit ouvert entre la présidence, le gouvernement et la Cour constitutionnelle. Mais cette décision, hautement symbolique, pourrait aussi ouvrir un nouveau débat au sein de la société portugaise : celui du modèle d’intégration et de solidarité que le pays souhaite défendre à l’avenir.

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