Malgré une conjoncture tendue et des marges déjà inférieures à la moyenne de la zone euro, plus de 80 % des entreprises portugaises ont choisi de ne pas répercuter l’augmentation des droits de douane américains sur les prix de vente finaux. Un choix qui témoigne d’une volonté de rester compétitif sur les marchés internationaux, mais qui soulève des interrogations quant à la viabilité à moyen terme de ce positionnement.
Selon une enquête « flash » réalisée par l’Association des Entrepreneurs Portugais (AEP) entre le 4 et le 10 avril, seuls 18 % des 296 entreprises interrogées déclarent envisager une adaptation immédiate de leurs prix ou de leurs coûts. Les autres semblent préférer absorber l’impact, du moins dans l’immédiat, quitte à rogner sur leur rentabilité.
Un contexte de fragilité financière structurelle
Le Portugal se distingue depuis plusieurs années par des marges commerciales plus faibles que la moyenne européenne. Cette faiblesse structurelle limite la capacité des entreprises à absorber des chocs exogènes comme une hausse brutale des coûts d’exportation. Pour autant, les dirigeants sondés par l’AEP 1 estiment que répercuter la hausse tarifaire sur les prix pourrait affaiblir leur position concurrentielle, notamment face à des rivaux européens ou asiatiques.
« Les entreprises opèrent dans un marché mondial hautement concurrentiel. Il est compréhensible qu’elles n’envisagent pas dans l’immédiat de répercuter les surcoûts sur leurs clients. Mais à terme, ne pas ajuster les prix pourrait menacer leur viabilité économique« , alerte Luís Miguel Ribeiro, président de l’AEP.
Un tiers des entreprises sans plan de réaction
L’enquête révèle également qu’environ 36 % des entreprises n’ont prévu aucune stratégie de réponse face à cette hausse des tarifs. Un constat que le président de l’AEP juge « naturel », les entreprises n’étant pas préparées à une telle remise en question du système de libre-échange établi depuis des décennies. Cette incertitude géopolitique empêche certaines d’entre elles de prendre des décisions stratégiques à court terme.
La diversification des marchés et la redirection des flux commerciaux apparaissent comme les principales pistes envisagées par les dirigeants interrogés. Toutefois, comme le rappelle Luís Miguel Ribeiro, « il ne s’agit pas d’une mesure que l’on peut appliquer du jour au lendemain« .
Une photographie du tissu productif portugais
Sur les 296 entreprises interrogées, 71 % sont exportatrices et 50 % appartiennent au secteur industriel. Le tissu entrepreneurial représenté est composé à 42 % de micro et petites entreprises, 46 % de moyennes, et 12 % de grandes entreprises.
Les résultats de cette enquête, déjà transmis au ministère de l’Économie dirigé par Pedro Reis, offrent un éclairage concret sur la difficulté pour les entreprises portugaises à s’adapter à un contexte commercial international de plus en plus instable. Si l’option du gel des prix peut paraître stratégique à court terme, elle pourrait s’avérer intenable si les tensions commerciales perdurent.
- AEP : https://www.aeportugal.pt/ ↩︎