Élections : la coalition de droite s’impose, Chega bouscule le PS

Aliança Democrática

Le Portugal a voté ce 18 mai 2025. Pour la troisième fois en trois ans, les électeurs portugais se sont rendus aux urnes dans un contexte de crise politique persistante. Et cette fois, le verdict est sans appel : la coalition de centre-droit Aliança Democrática (AD), menée par le Premier ministre sortant Luís Montenegro, remporte les législatives avec 32,72 % des voix et 86 sièges à l’Assemblée de la République. Un résultat qui consacre la montée en puissance de la droite, mais ne garantit pas pour autant la stabilité gouvernementale.

Avec une participation en hausse (abstention à 35,67 %, son plus bas niveau depuis 30 ans), le scrutin marque aussi une inflexion démocratique significative. Si l’AD arrive en tête, c’est surtout l’irruption du parti d’extrême droite Chega, qui égale le Parti socialiste en nombre de députés, qui redessine brutalement le paysage politique portugais.

Une victoire nette mais sans majorité pour l’AD

montenegro

Avec 32,72 % des suffrages, l’AD progresse par rapport à 2024 et confirme son ancrage comme première force politique du pays. Mais ses 86 sièges restent très loin de la majorité absolue (116). Luís Montenegro, fidèle à sa promesse de ne pas s’allier avec le Chega, devra désormais trouver des appuis dans l’Iniciativa Liberal (5,53 %, 9 sièges) ou auprès de députés indépendants pour former un gouvernement viable.

L’Aliança Democrática (…) confirme son ancrage comme première force politique du pays

Dans son discours de victoire, le Premier ministre a appelé à la responsabilité : « Les Portugais ne veulent plus d’élections anticipées. Ils exigent une législature de quatre ans. » Il a affirmé vouloir honorer la volonté populaire, tout en excluant une coalition avec les extrêmes.

Chega, désormais incontournable

Luis ventura

Avec 22,56 % des voix et 58 sièges, le parti Chega d’André Ventura réalise un score historique. Il double sa représentation et se positionne comme la deuxième force parlementaire (à égalité avec le PS). Une situation inédite qui consacre, selon son leader, la fin du bipartisme portugais : « Chega a fait exploser le système politique. Rien ne sera plus comme avant. »

Ventura s’est cependant gardé d’annoncer s’il faciliterait la formation d’un gouvernement. Il a réaffirmé sa volonté de gouverner un jour, déclarant : « Je ne m’arrêterai pas tant que je ne serai pas Premier ministre. »

La gauche en déroute

Pedro Nuno Santos

Le grand perdant de ce scrutin est le Partido Socialista, dirigé par Pedro Nuno Santos. Avec 23,38 % des voix et 58 sièges, le PS perd 20 députés par rapport à 2024. Cette défaite, largement anticipée dès les premières projections, a provoqué la démission du leader socialiste dès le soir du vote, dans une salle quasi vide, marquée par le silence et la déception.

Le Bloco de Esquerda tombe à un seul député, la CDU recule à 3 sièges, et le PAN conserve un unique représentant. Seul Livre tire son épingle du jeu à gauche avec 6 élus.

Le nouveau Parlement portugais

resultats elections 2025
Parti / Coalition% des voixSièges
AD (centre-droit)32,72 %86
PS (socialistes)23,38 %58
Chega (extrême droite)22,56 %58
Iniciativa Liberal5,53 %9
Livre4,20 %6
CDU (PCP + Verts)3,03 %3
PSP, CDS-PP, PPM0.62 %3
Bloco de Esquerda2,00 %1
PAN1,36 %1
Autres5
Total100 %230

Une participation en hausse : regain démocratique ou mobilisation stratégique ?

Avec une abstention à 35,67 %, les élections de 2025 affichent la participation la plus élevée depuis 1995. Un signal positif après des décennies de déclin, même s’il reste encore loin du niveau de 1975 (91 %). Le vote anticipé, notamment en transit, a atteint des niveaux record avec plus de 333.000 électeurs concernés.

Ce regain d’engagement peut s’expliquer par la forte polarisation du scrutin, la médiatisation des scandales, ou encore la volonté de contrer la progression de l’extrême droite.

Et maintenant ? Les scénarios de gouvernabilité

Le Portugal entre dans une phase d’incertitude institutionnelle. Le président Marcelo Rebelo de Sousa devra consulter les partis pour nommer un Premier ministre disposant d’un soutien suffisant au Parlement. La tâche s’annonce délicate, car aucune coalition naturelle ne semble en mesure d’atteindre la majorité absolue.

Les options probables sont :

  • Un gouvernement minoritaire AD + Iniciativa Liberal : fragile, mais cohérent idéologiquement
  • Un blocage parlementaire avec impossibilité de voter le programme de gouvernement
  • Une législature courte, menacée de dissolution en cas d’impasse prolongée

Un tournant politique pour le Portugal

Ce scrutin marque un changement d’ère. Le bipartisme qui structurait la démocratie portugaise depuis 1976 semble brisé. L’extrême droite s’impose comme une force durable. La gauche entre dans une phase de recomposition. Et le centre-droit, même vainqueur, reste suspendu à des équilibres parlementaires instables.

Dans les prochains jours, c’est l’arithmétique et la volonté de dialogue entre les forces élues qui décideront du visage du futur gouvernement portugais. Pour Luís Montenegro, le défi est immense. Et le Portugal entre dans une nouvelle phase politique, plus fragmentée, plus incertaine… mais peut-être aussi plus représentative.


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