Vale de Poldros, l’ultime sentinelle du Gerês

Vale de Poldros

Aux confins du Portugal septentrional, perchée à plus de 1200 mètres d’altitude, une branda oubliée s’accroche au flanc de la montagne comme un souvenir vivant : Vale de Poldros. Ce hameau, qui n’a jamais été une vraie « aldeia« , n’a aujourd’hui qu’un seul habitant. Mais quel habitant. Un homme seul, Fernando Gonçalves, y a redonné souffle et chaleur humaine grâce à un restaurant atypique. Ce n’est pas une simple histoire de solitude, mais un véritable conte de résistance, de mémoire et de terroir, niché aux portes du parc national de Peneda-Gerês.

Une branda du Minho aux allures de village hobbit

Branda Santo António Val de Poldros

Située dans la commune de Monção, Vale de Poldros, aussi appelée Santo António de Vale de Poldros, est une des nombreuses brandas 1 qui jalonnent les hauteurs du nord du Portugal. Ces hameaux d’altitude étaient jadis habités seulement en été, dans le cadre de la transhumance traditionnelle. On y menait les troupeaux lorsque les plaines devenaient trop chaudes, laissant les « inverneiras » plus bas dans les vallées.

Ce va-et-vient saisonnier a aujourd’hui disparu, laissant place à un silence minéral. Pourtant, Vale de Poldros reste là, comme figée dans le granit et le temps. À 1200 mètres d’altitude, elle offre une vue imprenable sur les crêtes boisées de la serra da Peneda. Ce paysage immense et majestueux évoque pour de nombreuses personnes les décors épiques des films de fantasy, au point que certains l’ont appelé le « village hobbit » sur les réseaux sociaux. Mais rassurez-vous, ici point de hobbits ni de magie noire : seulement la magie de la pierre, du vent, de la mousse, et la présence lumineuse de Fernando Gonçalves.

Les maisons sont en granit brut, sobres, robustes. Le vert profond des mousses couvre les toits de lauzes. Chaque détail respire la ruralité ancienne, celle des temps où l’homme vivait en osmose avec les saisons. On entre ici comme dans un sanctuaire de la vie pastorale du Minho.

Fernando, l’homme qui ne voulait pas partir

Fernando

Un retour volontaire aux sources

Après des années passées à Andorre, Fernando Gonçalves est revenu au pays en 2004. Il aurait pu, comme tant d’autres, rester dans la diaspora. Mais la montagne, le Minho, l’appelait. Plutôt que de fuir l’isolement, il a choisi d’en faire une force. Sa décision : s’installer seul dans Vale de Poldros et y ouvrir un restaurant.

Ce geste n’est pas anodin. En recréant du lien social, en faisant de la gastronomie un pont entre le passé et le présent, Fernando a insufflé une nouvelle vie à ce lieu délaissé. Le silence est encore là, bien sûr, mais il est habillé de rires, d’odeurs de cuisson, de conversations animées autour d’une table.

Un restaurant, mille rencontres

Le restaurant s’appelle tout simplement « Vale de Poldros« . C’est un lieu à la fois intime et accueillant, où l’on sert des plats du terroir sans chichi, faits avec amour et selon les produits de saison. Pas de menu fixe : la carte change selon l’inspiration du chef, la météo, la nature.

Parmi les spécialités : soupe de saramagos (une plante sauvage), feijões afogados, novilho assado, ou encore un impressionnant costeletão grillé. Le tout est servi par Fernando lui-même, qui est à la fois patron, cuisinier, serveur et hôte. On vous l’a dit, il est seul à habiter ici !

Un hameau ranimé par la convivialité

Chaque client de passage est accueilli comme un ami. Certains reviennent, d’autres viennent par curiosité, attirés par l’histoire de ce village de « l’homme seul » devenue virale sur Internet. Ils font le déplacement de tout le pays et même d’Espagne. Tous repartent enchantés, souvent avec la promesse de revenir.

Et ainsi, le restaurant donne à Vale de Poldros un nouveau rôle : celui de carrefour, de lieu de partage et de mémoire vivante. Sans Fernando, ce hameau serait probablement tombé dans l’oubli.

Une mémoire de pierre et de transhumance

BRANDA Santo António do Vale dos Poldros | MONÇÃO | PORTUGAL

Mais Vale de Poldros, ce n’est pas qu’une curiosité contemporaine. C’est aussi un témoin de la transhumance traditionnelle. Autrefois, les habitants de Riba de Mouro montaient ici avec leurs troupeaux pendant l’été, puis redescendaient à l’approche de l’hiver.

Ce mode de vie adapté à la montagne s’inscrivait dans un cycle saisonnier immuable. Aujourd’hui, la pratique a presque disparu, mais le souvenir en demeure. Les « brandas » comme Vale de Poldros portent encore cette mémoire dans leur architecture, leur isolement, leur identité.

Ce patrimoine immatériel est précieux. Il raconte un Portugal de l’intériorité, des gestes simples et du respect des cycles naturels. Il rappelle que l’habitat humain n’a pas toujours été synonyme de densité urbaine, mais aussi d’équilibre avec le milieu.

Vale de Poldros est une archive à ciel ouvert. Mais elle n’est pas figée : elle vibre encore, grâce à la passion d’un homme qui n’a pas renoncé à son pays. Son courage est contagieux.

Informations pratiques pour les visiteurs

Le Portugal regorge de villages spectaculaires, mais rares sont ceux qui racontent une histoire aussi touchante que celle de Vale de Poldros. Cette branda hors du temps, portée à bout de bras par Fernando Gonçalves, nous rappelle que la vie persiste même là où tout semble fini. Et que parfois, il suffit d’un seul homme pour faire revivre un monde entier.

  1. Une branda (au pluriel : brandas) est un petit hameau occupé uniquement pendant les mois chauds, généralement au printemps et en été. Elle est située en altitude, là où les pâturages sont plus frais et abondants. En hiver, les habitants descendaient vivre dans des inverneiras, des villages situés plus bas, mieux protégés du froid et plus proches des cultures hivernales. ↩︎
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