La composition du nouveau gouvernement portugais, présentée par le Premier ministre Luís Montenegro au Président de la République, marque une rupture notable avec les précédentes configurations ministérielles. En particulier, la disparition du ministère autonome de l’Économie au profit d’un portefeuille élargi à la Coésion territoriale suscite interrogations et espoirs prudents parmi les acteurs économiques, notamment dans le secteur du tourisme.
Un ministère élargi mais toujours pas de ministère du Tourisme
La Confédération du Tourisme du Portugal (CTP) 1 a réagi rapidement, soulignant deux absences significatives : celle d’un ministère dédié spécifiquement au Tourisme (revendication portée de longue date par la CTP) et celle, plus structurelle, d’un ministère proprement dit de l’Économie. Le secteur, désormais placé sous la tutelle du nouveau ministère de l’Économie et de la Cohésion territoriale, sera dirigé par Manuel Castro Almeida.
Pour Francisco Calheiros, président de la CTP, la création d’un « superministère » peut, en théorie, représenter une opportunité. « Cela pourrait contribuer à la dynamisation économique, en réunissant les leviers de croissance, à la fois sectoriels et territoriaux, au sein d’un même organe exécutif », déclare-t-il. Mais il tempère aussitôt : « Nous espérons que le tourisme continuera à y être considéré à sa juste valeur, notamment sur le plan des politiques publiques et des dossiers stratégiques urgents. »
Qui est Manuel Castro Almeida, le nouveau superministre ?
Figure expérimentée de la scène politique portugaise, Manuel Castro Almeida cumule plusieurs décennies d’engagement public au sein du Parti social-démocrate (PSD). Ancien député à l’Assemblée de la République et secrétaire d’État à l’Éducation et aux Sports, il a également exercé trois mandats en tant que maire de São João da Madeira, où il a laissé l’image d’un gestionnaire rigoureux, attentif aux enjeux territoriaux.
En 2013, il rejoint le gouvernement de Pedro Passos Coelho en tant que secrétaire d’État au Développement régional, un poste clé pour la mise en œuvre des fonds européens dans les régions du pays. Son action est alors saluée pour sa capacité à articuler les programmes européens aux réalités locales.
Avec l’arrivée de Rui Rio à la tête du PSD en 2018, Castro Almeida accède à l’un des postes de vice-président du parti, fonction qu’il occupera jusqu’à sa démission en 2019. Ce départ, discret mais remarqué, est interprété comme une prise de distance face aux tensions internes du parti.
Son retour au gouvernement, en 2025, comme ministre de l’Économie et de la Cohésion territoriale, intervient dans un contexte de recomposition ministérielle. À la tête de ce nouveau « superministère », il incarne une double compétence : la connaissance fine des mécanismes de développement régional et une vision pragmatique de l’économie appliquée aux territoires. Une combinaison jugée prometteuse pour relever les défis structurels et sociaux du Portugal contemporain.
Un pari sur la cohérence territoriale et l’efficacité
Ce regroupement inédit peut être perçu comme une tentative de rationalisation des compétences : la logique territoriale (via les fonds structurels européens et les politiques de cohésion) pourrait ainsi s’articuler plus efficacement avec le tissu économique local et national. Le portefeuille confié à Manuel Castro Almeida réunit ainsi des enjeux aussi variés que le soutien aux PME, le développement des infrastructures, la gestion des aides régionales, et l’animation des secteurs porteurs comme le tourisme, l’industrie ou les services numériques.
La CTP se dit confiante quant à la capacité de M. Castro Almeida à mener ce vaste ministère, saluant sa connaissance fine des dynamiques institutionnelles et son écoute vis-à-vis des besoins du terrain. L’organisation affirme sa volonté de collaborer étroitement avec le nouveau ministre, notamment pour que le tourisme demeure un axe stratégique du développement national.
Une réforme de l’État en ligne de mire
Autre nouveauté soulignée par la CTP : la création d’un Ministère de la Réforme de l’État. Cette initiative est saluée comme un « signal positif » par la Confédération, qui plaide depuis plusieurs années pour une refonte en profondeur de l’organisation administrative. « Le fait de créer une structure ministérielle spécifique montre que le gouvernement reconnaît l’urgence de réformer et moderniser l’appareil d’État », souligne Francisco Calheiros. La CTP y voit une opportunité de renforcer l’efficacité publique et de créer les conditions structurelles favorables à l’investissement et à la compétitivité.
Une attente forte de stabilité
Dans un contexte marqué par les incertitudes géopolitiques et économiques mondiales, la Confédération du Tourisme de Portugal appelle à une stabilité gouvernementale durable, condition essentielle selon elle pour « garantir un climat propice à la croissance économique, à l’équilibre social et à la projection de l’image du pays à l’international ».
En somme, si la suppression du ministère de l’Économie au sens strict peut surprendre, elle s’inscrit dans une logique de réorganisation visant à décloisonner les approches sectorielles. La réussite de cette stratégie reposera néanmoins sur la capacité du nouveau ministre à concilier les impératifs du développement économique avec ceux de la cohésion territoriale et de l’inclusion sociale. Et sur le traitement réservé au tourisme, fer de lance de l’économie portugaise.
- Confédération du Tourisme du Portugal : https://ctp.org.pt/ ↩︎