Arraiolos officialise la candidature de son savoir-faire à l’UNESCO

tapis unesco

Dans le cœur blanc et paisible de l’Alentejo, un geste séculaire pourrait bientôt obtenir la reconnaissance mondiale qu’il mérite. La municipalité d’Arraiolos, berceau du célèbre tapis brodé qui porte son nom, s’apprête à formaliser d’ici fin juin 2025 la candidature du savoir-faire du Tapete de Arraiolos au Patrimoine culturel immatériel de l’humanité auprès de la Commission nationale de l’UNESCO. Une initiative portée par des années de travail minutieux, et soutenue par une communauté attachée à ses racines.

Une reconnaissance pour l’art du fil, pas seulement pour l’objet

tapis d'arraiolos

« Ce n’est pas le tapis en soi que nous défendons, mais le savoir-faire qui le fait naître », a précisé Sílvia Pinto, maire d’Arraiolos, lors de la clôture de l’événement « O Tapete está na Rua », une fête populaire rendant hommage à cet art ancestral. Car ce qui est en jeu ici, c’est la transmission d’une pratique artisanale complexe, incarnée depuis plus de quatre siècles par les brodeuses d’Arraiolos, et transmise discrètement de génération en génération.

Les tapis d’Arraiolos sont brodés à la main sur une toile, selon la technique singulière du ponto de Arraiolos, un point oblique cousu en croix, propre à cette tradition. Ces œuvres textiles, déjà mentionnées dans des sources datant de 1598, ne sont pas seulement des objets de décoration. Elles racontent une mémoire collective, un lien entre le geste féminin quotidien et l’identité profonde d’un territoire.

La municipalité insiste sur la distinction fondamentale entre le produit fini et l’acte de le fabriquer. C’est bien la pratique, le geste, l’apprentissage lent et méticuleux du point, qui est ici proposé à l’inscription. Car « lorsqu’il n’y aura plus personne pour broder, alors le tapis d’Arraiolos aura disparu », a averti la maire, soulignant l’urgence d’une reconnaissance internationale.

Une candidature fondée sur la recherche et la rigueur

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La constitution du dossier s’est appuyée sur un vaste travail de recherche entrepris depuis trois ans. Archives, journaux anciens, témoignages, documentation technique et historique ont été mobilisés pour étoffer le dossier. « Nous avons voulu présenter une candidature solide, fondée sur des preuves, sur une histoire bien documentée et sur la persistance d’un savoir-faire vivant », a déclaré la présidente de la municipalité.

Le dossier comporte un film explicatif, des fiches techniques et une étude complète sur l’évolution historique du tapis. Il sera remis officiellement à la Commission nationale portugaise pour l’UNESCO courant juin 2025. Son évaluation est prévue pour l’année 2026, selon le calendrier habituel de l’organisation.

Durant l’événement « O Tapete está na Rua », la proposition a reçu un accueil très favorable, notamment de la part de la vice-présidente de la Commission de coordination et de développement régional de l’Alentejo. La qualité de la documentation et la clarté des arguments ont été saluées comme les points forts du dossier, en particulier la mise en avant du rôle central des brodeuses.

Une pratique en péril, une communauté engagée

OSAE.tv | Reportagem sobre os Tapetes de Arraiolos

Si le tapis d’Arraiolos jouit d’une notoriété indéniable au Portugal et au-delà, sa production est fragilisée. La demande existe, mais les personnes capables de le confectionner sont de moins en moins nombreuses. L’apprentissage, long et exigeant, attire peu les jeunes générations. Face à cette érosion, la municipalité s’engage pour revaloriser les artisanes et assurer la continuité de cette pratique. « Il faut qu’elles soient reconnues, soutenues, rémunérées à la hauteur de leur art », affirme Sílvia Pinto.

Cette mobilisation locale s’inscrit dans un mouvement plus large de reconnaissance des savoir-faire traditionnels, qui constituent une richesse non reproductible et un pilier du patrimoine immatériel mondial. Pour Arraiolos, cette inscription à l’UNESCO serait bien plus qu’un label : elle serait une protection, une visibilité et une promesse de transmission.

Vers un renouveau du tapis d’Arraiolos ?

Au-delà de la préservation, la question de la modernisation du tapis se pose également. Des artistes et designers, comme Rodrigo Azambuja, ont déjà initié des relectures contemporaines du motif traditionnel, mêlant géométrie moderne et inspirations patrimoniales. Cette hybridation entre tradition et création contemporaine pourrait être l’une des clés pour séduire de nouveaux publics et relancer la production.

Les institutions locales, les brodeuses et les passionnés espèrent que l’UNESCO offrira à Arraiolos un nouvel élan, permettant de renforcer les dynamiques économiques, culturelles et touristiques autour de cet art unique. En Alentejo, chaque point de laine tissé est une forme de résistance au temps qui passe.

En soumettant le savoir-faire du tapis d’Arraiolos à l’UNESCO, la ville affirme la valeur universelle de ce patrimoine discret, fait de gestes lents et de transmission silencieuse. C’est toute une mémoire du Portugal rural, féminine, artisanale, qui pourrait ainsi franchir les frontières et s’inscrire dans l’histoire mondiale du patrimoine culturel. À Arraiolos, plus que jamais, on brode l’avenir avec du fil ancien.

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