Dans un contexte où les préoccupations climatiques dominent les agendas politiques et sociétaux, une nouvelle inattendue redonne un souffle d’espoir au sud du Portugal : les barrages de l’Algarve affichent en 2025 un taux de remplissage moyen de 88 %, soit un niveau record selon l’Agence portugaise de l’environnement (APA). Une performance inédite dans cette région historiquement marquée par des périodes prolongées de sécheresse.
Une situation exceptionnelle après des années critiques
Depuis plus d’une décennie, l’Algarve souffre d’un déficit chronique de précipitations. En moyenne, les pluies y sont inférieures de 25 à 30 % aux normales saisonnières, un taux qui a même atteint 45 % à partir de 2019. Cette pénurie d’eau a eu des conséquences sévères sur l’agriculture, les réserves d’eau potable et l’écosystème local. L’annonce d’un taux de remplissage à 88 % marque donc une rupture significative, saluée comme un événement exceptionnel.
Selon les données de l’APA 1, les six grands barrages de la région totalisent près de 393 hectomètres cubes (hm3) d’eau stockée. Un chiffre qui représente une augmentation de 194 hm3 par rapport à l’année précédente, répartis à hauteur de 43 % dans le Sotavento (Algarve de l’Est) et 57 % dans le Barlavento (Algarve de l’Ouest).
Pour les spécialistes, cette remontée spectaculaire ne doit toutefois pas masquer la réalité : « Cette année est une exception. Il ne faut pas penser qu’elle se reproduira facilement« , a averti un porte-parole de l’APA. L’occasion est donc idéale pour intensifier les projets de résilience et préparer l’avenir.
Des chiffres impressionnants pour chaque barrage

Focus sur les barrages du Sotavento
Dans l’est de l’Algarve, les deux principaux barrages enregistrent des niveaux quasi maximaux. Le barrage d’Odeleite affiche 97 % de remplissage, soit 126,5 hm3 sur une capacité totale. Quant au barrage de Beliche, il atteint 92 % avec 44,32 hm3. Ces niveaux rassurent les exploitants agricoles et les municipalités, dont la dépendance à ces ressources est vitale, notamment en période estivale.
La région du Sotavento, particulièrement vulnérable aux variations climatiques, pourrait ainsi aborder les mois chauds avec un peu plus de sérénité. Toutefois, les autorités rappellent que ces stocks doivent être gérés avec parcimonie pour éviter de replonger rapidement dans la pénurie.
Focus sur les barrages du Barlavento
Côté ouest, la situation est tout aussi encourageante. Le barrage d’Odelouca, le plus important de la région, est rempli à 90 % avec 141,46 hm3. Le barrage de Funcho affiche 83 % (39,59 hm3), tandis que celui de l’Arade atteint 72 % (20,31 hm3). Seul le barrage de Bravura, à 60 %, reste en deçà de la moyenne régionale, même s’il marque une nette amélioration par rapport aux années précédentes.
Cette répartition géographique montre que les précipitations ont bénéficié de façon relativement homogène aux différentes zones, un phénomène rare selon les climatologues. La coordination entre les différents bassins hydriques pourrait être renforcée pour optimiser la gestion de cette ressource précieuse.
Barrage | Région | Capacité actuelle (hm3) | % de remplissage |
---|---|---|---|
Odeleite | Sotavento | 126,50 | 97% |
Beliche | Sotavento | 44,32 | 92% |
Odelouca | Barlavento | 141,46 | 90% |
Arade | Barlavento | 20,31 | 72% |
Bravura | Barlavento | 20,73 | 60% |
Funcho | Barlavento | 39,59 | 83% |
Des projets de résilience en ligne de mire
Consciente du caractère exceptionnel de cette année hydrologique, l’APA insiste sur la nécessité d’investir rapidement dans des projets de résilience. Le renforcement des infrastructures de stockage, la réutilisation des eaux usées traitées, ainsi que l’optimisation des réseaux d’irrigation figurent parmi les priorités.
Des campagnes de sensibilisation visant à réduire le gaspillage d’eau et à encourager les pratiques agricoles durables sont également en cours. L’objectif : anticiper les effets du changement climatique et réduire la dépendance à des conditions météorologiques aussi imprévisibles que fragiles.
En mars 2025, le gouvernement a déjà réduit les restrictions d’usage de l’eau à Faro, tout en maintenant des limites de 5 % pour l’agriculture, le secteur urbain et le tourisme. Une mesure prudente qui témoigne de la volonté de concilier opportunité et vigilance.
Une trêve bienvenue dans un contexte délicate
Si les barrages pleins donnent à court terme un peu d’air à l’économie et aux habitants de l’Algarve, ils ne doivent pas faire oublier la tendance globale au dérèglement climatique. Les scientifiques s’accordent à dire que les épisodes extrêmes, qu’ils soient secs ou pluvieux, seront plus fréquents et plus intenses.
C’est donc dans une logique de long terme qu’il faut inscrire cette accalmie. Elle rappelle à quel point la gestion de l’eau est un enjeu transversal, à la fois écologique, économique et sociétal. La mobilisation de tous les acteurs, des institutions aux citoyens, est indispensable pour que cette ressource vitale reste disponible, en quantité comme en qualité. Le répit actuel est une chance, mais aussi un signal. Et c’est peut-être dans cette prise de conscience collective que réside le véritable espoir.
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