Comment les universités portugaises visent les étoiles

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Depuis quelques années, les universités portugaises ne se contentent plus de former les élites du pays. À la croisée des enjeux scientifiques, technologiques et climatiques, elles s’imposent désormais comme des acteurs clés de la recherche mondiale. Une dynamique illustrée par leur implication croissante dans des projets de haute volée, au cœur de consortiums européens. Dernier exemple en date : la participation de l’Instituto Superior Técnico à une mission d’envergure visant à débarrasser l’orbite terrestre des débris spatiaux. Un défi à la fois technique, écologique et géopolitique, que les chercheurs portugais relèvent aux côtés de six autres pays du continent.

Le projet gEICKo : des geckos pour nettoyer l’espace

gEICKo

Derrière ce nom étrange, gEICKo (Gecko Based Innovative Capture Kit) 1, se cache une ambition aussi limpide qu’audacieuse : mettre au point une technologie inspirée de la nature pour capturer les débris spatiaux en orbite. Financé par le Conseil européen de l’innovation, le programme réunit des institutions de six pays et mobilise ingénieurs, biologistes, roboticiens et experts du spatial autour d’un même objectif : empêcher que l’espace ne se transforme en dépotoir incontrôlable.

Le principe repose sur une propriété fascinante du gecko, cet animal capable de grimper sur des parois lisses grâce à des millions de poils microscopiques présents sous ses pattes. Ces structures exploitent les forces de van der Waals 2, permettant une adhésion réversible sans colle ni pinces. Les chercheurs tentent de reproduire cet effet en laboratoire à l’aide de matériaux synthétiques, pour créer un système de capture non invasif et autonome.

Au Portugal, c’est l’Instituto Superior Técnico 3 (rattaché à l’Université de Lisbonne) qui est en charge des systèmes de guidage et de navigation du futur satellite nettoyeur. L’enjeu est de taille : réussir à approcher et stabiliser des objets se déplaçant à des vitesses pouvant dépasser les 28.000 km/h, sans provoquer de collision ni ajouter de nouveaux fragments dans l’espace.

Une contribution portugaise stratégique

Instituto Superior Técnico
Instituto Superior Técnico

Avec un budget total de 4 millions d’euros et un prototype attendu d’ici 3 ans, le projet gEICKo marque une étape importante dans l’intégration du Portugal dans l’écosystème spatial européen. Il souligne également la montée en puissance des universités lusitaniennes sur la scène scientifique mondiale. Longtemps considérées comme périphériques, elles deviennent des hubs de recherche capables d’apporter des solutions concrètes à des problématiques globales.

Entre intelligence artificielle et durabilité

Cette évolution ne se limite pas au secteur spatial. Au-delà du Técnico, d’autres établissements portugais multiplient les coopérations dans des domaines variés : énergies renouvelables, informatique quantique, biotechnologies, IA. Leur approche repose sur une hybridation des savoirs, en phase avec les grandes tendances de la science contemporaine. À Lisbonne, Porto, Coimbra ou Braga, les laboratoires universitaires attirent des jeunes chercheurs de toute l’Europe, séduits par la vitalité de la recherche et le coût de la vie relativement modéré.

Le succès de startups issues de ces écosystèmes, comme Neuraspace 4 (spécialisée dans la gestion de trafic spatial), illustre le lien étroit entre recherche académique et entrepreneuriat technologique. Les universités ne sont plus seulement des lieux de formation : elles sont devenues des incubateurs de solutions, des plateformes de transfert de technologie et des partenaires industriels à part entière.

Un changement de paradigme pour le Portugal

Ce basculement est aussi un enjeu d’image et de positionnement stratégique pour le pays. Traditionnellement tourné vers la mer, le Portugal redécouvre aujourd’hui une autre forme d’exploration : celle de l’espace, mais aussi de la connaissance et de l’innovation. Ce tournant ne doit rien au hasard. Il s’appuie sur des politiques publiques favorables à la recherche, des financements européens ciblés, et une volonté politique de faire du pays un acteur de l’économie de la connaissance.

Le ministère de la Science, de la Technologie et de l’Enseignement supérieur multiplie les annonces et les appels à projets. Les universités sont encouragées à internationaliser leur recherche, à tisser des partenariats, et à intégrer des consortiums européens. À moyen terme, l’objectif est clair : faire du Portugal une nation scientifique, reconnue non seulement pour sa qualité de vie, mais aussi pour sa capacité à produire de la science de haut niveau.

Des universités au cœur de l’écosystème spatial européen

université porto

Le projet gEICKo cristallise cet élan. Il illustre la manière dont un établissement national peut contribuer à résoudre un problème mondial, avec des compétences locales et une vision collaborative. En s’attaquant à la pollution spatiale, les chercheurs portugais ne nettoient pas seulement l’orbite : ils réhabilitent le rôle des universités comme moteurs d’innovation et gardiens du bien commun scientifique.

Derrière ce projet, il y a aussi un changement culturel profond. On n’envoie plus seulement des satellites depuis le Portugal, on conçoit des solutions pour rendre l’espace plus sûr, plus durable, plus humain. Dans un monde où les frontières entre science, technologie et écologie sont de plus en plus poreuses, les universités portugaises prouvent que l’on peut penser global depuis Lisbonne, rêver plus loin depuis Coimbra, et inventer demain depuis Porto.

Projet / InitiativeInstitution portugaiseDomainePartenaires européens
gEICKoInstituto Superior TécnicoRobotique / Espace6 pays (UE)
NeuraspaceSpin-off universitaireIA / Débris spatiauxESA, CNES, etc.
SmartBioTechUniversité de CoimbraBiotechnologiesEspagne, Allemagne
GreenTech EUUniversité de PortoÉnergies renouvelablesFrance, Belgique

Vers une génération d’ingénieurs du futur

À long terme, ce sont les étudiants qui bénéficieront de cette dynamique. Intégrés dans des projets internationaux, formés aux enjeux du XXIe siècle, ils deviennent les artisans d’une science ouverte, transnationale et responsable. Pour eux, la recherche n’est pas un concept abstrait, mais un terrain d’action concret, à la croisée de l’innovation technologique et de l’éthique environnementale.

De la salle de classe au centre de contrôle orbital, des amphithéâtres aux bancs d’essai, les universités portugaises sont en train de changer d’échelle. Et avec elles, c’est toute une génération qui s’apprête à réécrire les frontières du possible. Aujourd’hui le Portugal ne regarde plus seulement les étoiles : il participe activement à leur exploration.

  1. gEICKo : https://cordis.europa.eu/project/id/101223148 ↩︎
  2. Les forces de van der Waals désignent un ensemble d’interactions intermoléculaires faibles (mais omniprésentes), qui permettent à des molécules ou objets très proches les uns des autres de s’attirer sans liaison chimique directe. ↩︎
  3. Instituto Superior Técnico : https://tecnico.ulisboa.pt/pt/ ↩︎
  4. Neuraspace : https://www.neuraspace.com/ ↩︎
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