Christian Louboutin et ses maisons de rêve à Melides

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Il y a vingt ans, Christian Louboutin posait ses valises pour la première fois au Portugal. D’abord à Comporta, alors en pleine mutation, il y découvre une certaine douceur de vivre, un rapport au temps et à l’espace radicalement différent de celui du monde de la mode. Pourtant, c’est plus au sud, à Melides, qu’il choisira finalement de s’installer durablement, attiré par le calme de cette bourgade préservée entre mer, lagune et pinède.

À Melides, pas de paillettes ni de palaces, mais une nature souveraine, une lumière incomparable, et une authenticité que Louboutin respecte profondément. Il y développe peu à peu un véritable archipel privé : plusieurs maisons, toutes différentes, pensées comme des retraites artistiques où se conjuguent intimité, contemplation et hospitalité. Pour le créateur, ce n’est pas un domaine, mais un village : « J’aime que chacun ait sa cabane, et qu’on se retrouve pour les repas, comme dans Astérix », confie-t-il, amusé.

La Salvada : une architecture pensée pour la lumière et le silence

Un projet né de la vue

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La Salvada, la dernière née de ses maisons portugaises, est peut-être la plus personnelle. Tout part d’un terrain en pente douce, orienté vers le lagon et l’océan, dont la beauté saisit immédiatement Christian Louboutin. Il confie alors la conception de cette « folie architecturale » à son ami et collaborateur Tarek Shamma, architecte égyptien basé à Londres. Ensemble, ils imaginent un lieu sans fonction précise, fait pour écouter de la musique, faire la fête, lire ou méditer. Un lieu de pause, de respiration.

L’inspiration vient de loin : les observatoires de Jaipur, les stepwells du Rajasthan, et une fascination pour l’architecture sculpturale, brute et géométrique. Le béton, matière vivante, est ici travaillé comme une forme libre, traversée de lumière et de vides, de lignes obliques et d’ouvertures inattendues. À l’extérieur, une immense cheminée fait référence à l’architecture nabatéenne de Petra, autre obsession du créateur.

Une maison façonnée au fil des jours

salvada

Lorsque la pandémie de Covid interrompt le chantier, Louboutin se retrouve confiné à Melides. Il passe alors des semaines entières sur le site, observant la lumière, modifiant le plan, refermant certaines ouvertures pour protéger la maison de la chaleur. Ce processus intuitif, presque artisanal, transforme La Salvada en une œuvre vivante. « J’ai toujours aimé l’architecture. C’est un métier que j’aurais pu exercer. Travailler la matière, la forme, c’est quelque chose de profondément joyeux », confie-t-il.

Le résultat : une maison rose poudré, en rupture avec le blanc traditionnel de l’Alentejo. « Le blanc aurait trop tranché. Le rose s’accorde mieux avec la terre. » Des carreaux de céramique bleus ponctuent les murs, en écho à la teinte particulière du ciel à certaines heures du jour. Ici, tout dialogue : la couleur avec le paysage, la lumière avec les volumes, l’art avec l’espace.

Un univers d’objets, de récits et de voyages

Louboutin melides

À l’intérieur, rien n’est laissé au hasard. La Salvada est un théâtre d’objets, de textures et de souvenirs. Un tableau monumental de l’artiste pakistanais Imran Qureshi, haut de sept mètres, occupe l’un des murs principaux. Sa présence a guidé la conception des volumes, tout comme les tapis, les textiles syriens, les meubles brésiliens ou les céramiques mexicaines rassemblés ici au fil des ans.

Louboutin compose une mosaïque de styles et d’origines, entre Gaudí, Scarpa, artisanat portugais et design italien. Certaines pièces proviennent de la boutique Vida Dura, qu’il affectionne particulièrement pour la qualité et la singularité de son offre locale. Chaque objet raconte une histoire, chaque association d’éléments exprime une sensibilité, un goût du contraste et une forme de liberté esthétique rare.

Le Vermelho, première incursion dans l’hôtellerie

Vermelho

En 2023, Christian Louboutin ouvre à Melides son tout premier hôtel : le Vermelho 1, un écrin de 13 chambres conçu comme une maison d’amis très sophistiquée. Là encore, il mêle influences orientales, baroques et vernaculaires avec une liberté joyeuse. Le rouge, signature chromatique du créateur, y dialogue avec les azulejos, les bois sculptés, les vitraux, les ferronneries et les fresques murales dans une scénographie onirique, presque théâtrale.

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Le Vermelho n’est pas un hôtel classique. C’est une extension de son univers personnel, une invitation à vivre le Portugal autrement, à travers le prisme du détail, de l’élégance et de l’émotion. Pour Melides, c’est aussi un coup de projecteur — mais sans ostentation. Louboutin y agit avec discrétion, entouré d’artisans, de créateurs et d’amis. Il participe à faire rayonner la région sans en dénaturer l’essence.

Melides le laboratoire Louboutin

En quelques années, Christian Louboutin a transformé Melides en un laboratoire esthétique et existentiel, loin du bruit du monde, mais connecté à toutes les influences. Ses maisons, comme ses créations, racontent une passion pour les formes, les matières, les cultures et la beauté fragile des choses. Ici, dans cette Alentejo de lumière et de vent, il bâtit non pas un empire, mais une œuvre — vivante, sensible, profondément habitée.


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