L’humour a-t-il encore droit à l’impertinence au Portugal ?

joana marques

Le 11 juillet 2025, l’humoriste portugaise Joana Marques comparaîtra devant la justice dans le cadre d’une affaire qui interroge la place de la satire dans une démocratie. En cause : un sketch diffusé en 2022 dans son émission Extremamente Desagradável, diffusée sur la chaine Renascença, dans lequel elle tournait en dérision l’interprétation de l’hymne national par le duo musical Anjos lors du Grand Prix MotoGP à Portimão. Les deux frères, Nelson et Sérgio Rosado, se disent « humiliés », estiment que la vidéo a été manipulée, et réclament plus d’un million d’euros de dédommagement.

Une affaire civile aux résonances politiques et culturelles

Si l’affaire relève du droit civil, elle dépasse largement le cadre du simple différend entre artistes. Elle révèle une tension croissante au sein de la société portugaise entre la liberté d’expression artistique et une sensibilité accrue à l’image et à la réputation. La question posée est claire : jusqu’où l’humour peut-il aller lorsqu’il s’attaque à des personnalités publiques ?

Lors de l’audience du 30 juin, plusieurs figures emblématiques de la comédie portugaise, dont Ricardo Araújo Pereira et Fernando Alvim, ont pris la parole pour défendre le droit à la satire. Pereira a notamment déclaré que les Anjos étaient « plus blessés qu’endommagés », soulignant la disproportion entre la satire visée et les prétentions indemnitaires avancées.

Satire, dérision et rôle social

O motivo para os Anjos estarem a processar a Joana Marques em 1 milhão de euros

La satire joue un rôle essentiel dans les démocraties libérales. Elle permet de pointer les travers, d’exagérer le ridicule, d’ouvrir le débat sur des sujets parfois tabous. Dans le cas de Joana Marques, dont la carrière repose en grande partie sur ce principe de critique par l’humour, la frontière entre moquerie autorisée et diffamation est devenue soudainement floue.

Les défenseurs de l’humoriste craignent une « judiciarisation du rire » qui pourrait avoir un effet dissuasif sur toute expression critique. Ce climat est d’autant plus préoccupant que la satire, par essence, gêne, provoque, bouscule. Elle ne saurait être aseptisée sans perdre sa substance.

Un test pour l’état de droit au Portugal

Le procès Joana Marques devient ainsi un véritable test pour la justice portugaise. Sa décision aura une portée symbolique : elle dira si les tribunaux reconnaissent la spécificité du discours satirique, ou s’ils le soumettent aux mêmes standards que d’autres formes de communication publique.

Rappelons que dans d’autres pays européens, des jurisprudences ont affirmé que l’humour devait bénéficier d’une protection particulière, tant qu’il ne constitue pas une incitation à la haine. Le Portugal suivra-t-il cette voie ?

Un débat de société à suivre de près

En attendant le témoignage de Joana Marques le 11 juillet, le monde culturel portugais retient son souffle. La décision à venir ne concernera pas que l’humoriste et les plaignants. Elle fixera les contours d’une liberté essentielle à toute société démocratique : celle de pouvoir rire de tout, y compris de ceux qui chantent faux.

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